Le transport aérien, principal vecteur des épidémies humaines
AUJOURD'HUI, les déplacements en avion jouent un rôle majeur dans la propagation des épidémies. L'ère de la mondialisation industrielle est aussi celle de la globalisation des risques sanitaires. Les épidémies qui autrefois gardaient une dimension locale deviennent aujourd'hui très vite internationales. D'où l'inquiétude due à l'épidémie de grippe aviaire en Asie du Sud-Est ou encore la panique liée à celle de sras en Chine en 2003. Une équipe de physiciens vient de proposer une modélisation de la propagation des épidémies transmissibles d'homme à homme basée sur l'analyse du transport aérien (1). Des modèles qui pourraient s'avérer utiles si le virus de la grippe aviaire mute et provoque une épidémie humaine de grande ampleur.
Données globales
Des physiciens américains et français, de l'Indiana University, du CEA
et du CNRS, ont montré qu'il était possible de mieux comprendre la
propagation de potentielles épidémies au niveau mondial en recourant à
des modèles mathématiques intégrant la complexité du réseau de
transports aériens, principal vecteur de transmission. Les autres
modèles déjà établis pour la grippe, le sida ou le sras revêtaient un
caractère très partiel. C'est en effet la première fois qu'un modèle
intègre des données aussi globales que la banque de données IATA des
flux de passagers entre 3 100 aéroports et les populations des zones
desservies. 3 100 équations mathématiques montrant l'évolution du
nombre d'individus infectés par villes ont permis de montrer que «les épidémies, de la même façon que les passagers aériens, empruntent souvent les mêmes parcours privilégiés», explique
Marc Barthélémy, du département de physique théorique au CEA, un des
coauteurs de l'étude. Plus les flux de passagers sont importants au
départ de l'aéroport le plus proche du foyer de l'épidémie, plus la
prévision est aisée, car les gens empruntent souvent les mêmes canaux.
La propagation de l'épidémie du sras, via Hongkong, était donc
facilement prévisible. Un autre enseignement de cette étude est le fait
que les chercheurs sont désormais en mesure de donner un intervalle de
confiance à leurs prévisions, comme en météo.
Reste
encore à compléter ce modèle par d'autres variables, l'importance de la
transmissibilité de l'agent infectieux, la variation saisonnière ou les
conditions d'hygiène.
(1) Pnas, 03 février 2006.