École
de Physique des Astroparticules
- III
Astronomie Gamma
Contexte
Scientifique
Depuis environ 5 ans,
l’activité scientifique en physique des astroparticules est en
pleine ébullition, conditionnée par l’entrée en
fonction des grands observatoires comme HESS (High Energy Stereoscopic
System) et Fermi pour l’astronomie gamma, ou Auger et Antares
(Astronomy with a Neutrino Telescope and Abyss environmental RESearch)
pour l’observation des messagers non-photoniques et
particulièrement Virgo pour les ondes gravitationnelles. Pour
l’avenir, l’ambition des projets tel que AMS-02, CTA, SVOM, KM3NeT,
AdvancedVirgo et JEM-EUSO promettent des avancés encore plus
significatives.
Le programme de cette école thématique offrira un
panorama assez général de ce champ interdisciplinaire,
mais avec un accent plus particulier sur l’astronomie gamma. Ce choix a
été motivé par les avancés majeures
obtenues par le satellite Fermi et par l’observatoire Cherenkov HESS.
L’école se placera aussi dans la perspective des instruments
futurs, comme l’observatoire Cherenkov CTA ou le satellite SVOM pour
l’observation des sursauts gamma.
On abordera les thèmes suivants :
• Moyens
d’observation en rayons gamma
Les rayons gamma couvrent largement le spectre
électromagnétique, allant d’une centaine de keV à
10 TeV ou au-delà. Les flux des sources en photons gamma
s’étendent sur une large gamme (de ~10-3 photons/cm2/s aux plus
basses énergies à 10-12 photons/cm2/s aux plus hautes
énergies), nécessitant ainsi des télescopes ayant
des surfaces adaptés à la gamme d’énergie
explorée. De plus, le détecteur doit se trouver hors de
l’atmosphère, celle-ci étant opaque aux photons gamma,
dans l’espace ou en ballon stratosphérique, afin
d’accéder aux mesures directes des photons. La mesure indirecte
des gerbes atmosphériques, engendrées par les photons
gamma incidents, peut être utilisée exclusivement à
très haute énergie.
Nous passerons en revue les différents techniques de
détection des photons gamma, au sol et dans l’espace. Une
attention particulière sera portée sur les instruments en
exploitation et sur les télescopes en développement.
•
Processus
physiques
des
émissions
à
hautes
énergies
Les émissions observées en astronomie gamma
sont en général associées à l’existence de
populations de particules non-thermiques,
accélérées par des sources variées et selon
des mécanismes différents. Nous aborderons plus
particulièrement ces mécanismes
d’accélération ainsi que le transport des particules dans
le milieu interstellaire et intergalactique. Nous passerons aussi en
revue des processus radiatifs et relativistes de haute énergie
qui sont à l’origine des émissions observées.
• Observations
de
rayons
gamma :
analyse
de
données
Fermi
La mise
à disposition de la totalité de la base de données
du satellite Fermi, juste un an après l’entrée en
fonction de l’instrument, a permis à la communauté
scientifique de faire des progrès significatifs. Nous allons
profiter de cette opportunité pour organiser des travaux
pratiques autour de l’analyse des données. L’importance d’un tel
apprentissage requiert un après-midi entier à cette
activité, et avec la possibilité de la poursuivre en
soirée. Le but affiché est de se familiariser avec les
méthodes et les outils utilisés pour l’exploration du
ciel aux hautes énergies. Ainsi, on pourra se confronter de
manière explicite à la problématique de l’analyse
de données, ce qui permettra aussi d’apprécier les
incertitudes observationnelles.
• Sources
d’émissions
aux
hautes
énergies
Aujourd’hui,
l’astronomie gamma vit une période particulièrement
faste, et ce grâce à l’exploitation des données du
satellite Fermi lancé en 2008 (gamme d’énergie de 100 MeV
à 100 GeV) et des détecteurs Cherenkov au sol de
dernière génération (>100 GeV ; HESS,
MAGIC, VERITAS), qui ont révolutionné ce domaine. C’est
la première fois que le domaine électromagnétique
est couvert au-delà de 100 MeV.
Les progrès dans l’instrumentation ont permis d’accroître
de manière spectaculaire le nombre de sources (radio-galaxies et
blazars, pulsars gamma, restes de supernova, nébuleuses à
vent de pulsar…) afin d’en affiner leurs propriétés, et
de découvrir de nombreuses sources de nature nouvelles (pulsars
«milliseconde », binaires X, amas globulaires, lobes
radio géant de radiogalaxies, galaxies à flambés
d’étoiles, …). En plus des sources individuelles, on peut aussi
étudier les régions d’accélération des
particules et leur propagation à travers notre galaxie,
l’interaction des rayons cosmiques avec le gaz interstellaire est en
effet une source d’émission diffuse. Dans le domaine
extragalactique, cette émission diffuse nous renseigne sur (la
totalité de) la luminosité gamma qui est émise par
des sources lors de l’histoire de l’Univers, ainsi que sur son
évolution aux énergies les plus hautes. La qualité
des données actuelles permet aussi une recherche de plus en plus
poussée sur les composantes plus exotiques, résultantes
de l’annihilation de candidats de matière noire.
Ces avancées observationnelles sollicitent un effort
conséquent dans l’interprétation des données ainsi
que pour mieux les caractériser dans d’autres bandes spectrales.
En particulier, la surveillance du ciel par Fermi (balayage en 3
heures) permet de détecter l’apparition ou le changement d’une
activité des sources transitoires ou variables, incitant ainsi
leur observation. La confrontation des données gamma au GeV et
celles au TeV permet de mieux contraindre les processus
d’émission qui sont à l’origine de ces rayonnements.
À plus basses énergies, la mission INTEGRAL a
apporté des nouvelles contraintes sur les processus de
nucléosynthèse galactiques, et en particulier, sur
l’origine des positrons dans notre Galaxie. Bien que les positrons
puissent être naturellement produit en abondance lors des
explosions d’étoiles ou par les jets des objets compacts, une
contribution de l’annihilation de la matière noire n’est
toujours pas à exclure. Un effort de modélisation est
nécessaire pour comprendre au mieux les observations afin de
s’affranchir des questions de propagation et d’annihilation des
positrons dans notre galaxie.
Toutes ces questions sur les sources d’émissions gamma
seront abordées autant sur des aspects observationnels que
théoriques.
• Rayons
cosmiques
En astronomie
gamma, l’étude des rayons cosmiques peut se faire par le biais
de leurs interactions avec les composants du milieu interstellaire.
Plus directement, le rayonnement cosmique est observable par les
télescopes Fermi et HESS. Ils ont fourni une mesure
inédite du spectre à haute énergie de la
composante électronique des rayons cosmiques. Ces mesures sont
complétées par des observations avec le satellite PAMELA,
dédiées à l’étude des rayons cosmiques
à basses charges et à des énergies au-delà
de 50 MeV. Les données des trois instruments montrent des
variations spectrales inattendues, ce qui a suscité leur
interprétation, éventuellement liée à
l’annihilation de la matière noire. Néanmoins, une
origine purement astrophysique, comme l’accélération des
leptons par des sources proches tel que les pulsars ou les restes de
supernova, représente une alternative plus conventionnelle. Au
cours de cette école, on abordera également les
données obtenues par les vols ballons successifs de
l’expérience CREAM et les avancées attendues avec AMS-02.
Celles-ci apportent ou apporteront des contraintes sur le régime
de propagation des rayons cosmiques ainsi que sur la composante
d’anti-matière.
Aux plus hautes énergies, l’observatoire Pierre Auger a
été conçu pour la détection et
l'étude des rayons cosmiques dont les énergies sont
autour et au-dessus de la coupure spectrale de GZK (cad,
supérieures à 1019 eV) avec une précision sans
précédent. Aujourd’hui, nous ne connaissons pas les
mécanismes qui sont à l’origine de la production et
l’accélération des particules à de telles
énergies macroscopiques. Généralement peu
déviés par les champs magnétiques galactiques et
intergalactiques, la direction d’arrivée sur Terre des rayons
cosmiques d’ultra-haute énergie (E > 5 1019
eV) peut situer leurs sites d’accélération. Les
premiers 27 événements avec des énergies
supérieures à 5,7 1019 eV qui ont été
enregistrés par l’observatoire Pierre Auger sont distinctement
distribués d’une manière anisotrope sur le ciel. Cette
anisotropie semble être corrélée avec la
densité de la matière dans l’Univers proche, telle quelle
est représentée par la distribution des noyaux actifs
galactiques à une distance < 75 Mpc.
Nous allons aborder l’apport des observations directes des rayons
cosmiques, et nous établis serons des liens entre ses mesures
directes et les observations indirectes effectuées en astronomie
gamma.
• Ondes
gravitationnelles
L’énorme potentiel
scientifique lié à la détection des ondes
gravitationnelles couvre plusieurs domaines, allant de la physique
fondamentale à la cosmologie, en passant par l'astrophysique.
Par exemple, la vitesse des ondes gravitationnelles pourrait être
mesurée en comparant les temps d’arrivée à chaque
détecteur à ceux de signaux
électromagnétiques provenant de la même source (par
exemple un sursaut gamma). D’autre part, la masse du graviton pourrait
être contrainte en cherchant des distorsions dans la forme d’un
« chirp » (gazouillis) gravitationnel, par
rapport à celle prévue par la relativité
générale. En astrophysique, la coalescence des objets
compacts (étoiles à neutrons et trous noirs) est une
source intense d’ondes gravitationnelles, ouvrant ainsi un vaste
domaine d’investigations qui devrait permettre de mieux cerner la
physique de ces objets extrêmes. Enfin la détection des
ondes gravitationnelles primordiales donne la possibilité
d’étudier la phase de l’inflation de l’univers.
Les dernières années ont été
marquées par les premières mesures scientifiques des
interféromètres kilométriques Virgo et LIGO, qui
ont maintenant des sensibilités très proches des celles
qui étaient prévues. Désormais il est possible de
détecter une coalescence d’une binaire d'étoiles à
neutrons de 1,4 masses solaires à 15 Mpc environ et celle d'une
binaire de trous noirs de 20 masses solaires à environ 70 Mpc.
Avec ces limites, les taux estimés d’événements
sont encore trop faibles pour assurer une détection (environ 1
événement sur 200-300 ans). Toutefois, les
détecteurs de deuxième génération, Advanced
Virgo et Advanced LIGO apporteront une amélioration en
sensibilité par un facteur 10, se traduisant par un taux de
détection pour les coalescences d’étoiles binaires de
quelques événements par an pour les modèles les
plus pessimistes à une centaine d’événements par
an pour les modèles les plus optimistes. Ainsi, la
première détection d’ondes gravitationnelles est à
notre portée de main.
Nous allons aborder les prospectives scientifiques liées
à l’observation des ondes gravitationnelles, et nous
présenterons l’état de l’art des techniques de
détection. Le lien entre l’observation des ondes
gravitationnelles et celle des sources compactes à haute
énergie sera tout autant développé.
•
Neutrinos
La détection de
neutrinos cosmiques est un enjeu important en astrophysique des hautes
énergies, car elle permettra de trancher sur l’origine
hadronique ou leptonique des particules accélérées
dans les sources de rayons cosmiques. Interagissant faiblement avec la
matière, leur détection requiert alors un volume cible
gigantesque, ce qui attribue aux méthodes d’observation une
spécificité de nature géologique. Dans cette
perspective, les détecteurs de IceCube sont enfouis sous la
glace antarctique et le télescope ANTARES est situé dans
des profondeurs abyssales de la mer Méditerranée. La
prochaine étape envisagée qui pourra apporter la possible
première détection d’un neutrinos cosmique est le projet
KM3NeT qui vise un volume instrumenté de plus d’un km3 pour un
détecteur sous-marin en Méditerranée. Ce
télescope devrait améliorer d’un facteur 50 la
sensibilité actuellement accessible par ANTARES et
présenter une résolution angulaire significativement
meilleure que IceCube à haute énergie.
Nous discuterons le potentiel scientifique du domaine de l’astronomie
des neutrinos et explorerons les liens avec les observations
photoniques à haute énergie.
• Perspectives
Le domaine de
l’astroparticule se développe aujourd’hui au niveau
européen, voir au niveau mondial, avec la conception et la
réalisation des instruments de plus en plus performants et de
plus en plus complexes. Pour coordonner les efforts des pays
européens, des structures de coordination se sont mis en place,
telle que ASPERA pour l’astroparticule ou ASTRONET pour
l’astrophysique. Nous terminerons cette école avec une revue sur
les feuilles de routes établies par ces structures de
coordination.
LES
GRANDS
AXES DU PROGRAMME
Le
programme de cette école met en
évidence les point forts
des
thèmes suivants :
- Astronomie Gamma
(sol, espace)
- Processus et
sources d’émission à haute
énergie
- Rayons cosmiques
- Neutrino - Matière
noire
- Ondes
gravitationnelles
Il
vise à
couvrir autant les aspects observationnels
que théoriques.
|
Comité
Scientifique
Michel Boer, Observatoire de Haute
Provence
Josè Busto, Centre de Physique des Particules
de Marseille
Paschal Coyle, Centre de Physique
des Particules de Marseille
Bernard Degrange, Laboratoire Leprince-Ringuet
Guillaume Dubus, Institut
de
Planétologie
et
Astrophysique de Grenoble
Yves Gallant, Laboratoire de
Physique Théorique et
Astroparticules
Berrie Giebels, Laboratoire
Leprince-Ringuet
Stavros Katsanevas,
Astroparticule et Cosmologie
Jürgen Knödlseder, Institut
de Recherche en
Astrophysique et Planétologie
|
Julien
Lavalle, Département de Physique Théorique,
Université de Turin
Benoit Lott, Centre d'Etudes Nucléaires de Bordeaux
Gradignan
Alexandre Marcowith,
Laboratoire Univers et Particules de Montpellier
Jean Orloff, Laboratoire
de Physique Corpusculaire,
Clermont-Ferrand
Etienne Parizot, Astroparticule et
Cosmologie
Guy Pelletier, Institut
de
Planétologie
et
Astrophysique de Grenoble
Pierre Salati, Laboratoire d'Annecy
le Vieux de Physique des
Particules
Roland Triay, Centre de Physique Théorique
..
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