IIIème Ecole de Physique des Astroparticules
23 -28 mai 2011
OHP, Saint Michel l'Observatoire
L’Astronomie Gamma

Contexte Scientifique


Depuis environ 5 ans, l’activité scientifique en physique des astroparticules est en pleine ébullition, conditionnée par l’entrée en fonction des grands observatoires comme HESS (High Energy Stereoscopic System) et Fermi pour l’astronomie gamma, ou Auger et Antares (Astronomy with a Neutrino Telescope and Abyss environmental RESearch) pour l’observation des messagers non-photoniques et particulièrement Virgo pour les ondes gravitationnelles. Pour l’avenir, l’ambition des projets tel que AMS-02, CTA, SVOM, KM3NeT, AdvancedVirgo et JEM-EUSO promettent des avancés encore plus significatives.
Le programme de cette école thématique offrira un panorama assez général de ce champ interdisciplinaire, mais avec un accent plus particulier sur l’astronomie gamma. Ce choix a été motivé par les avancés majeures obtenues par le satellite Fermi et par l’observatoire Cherenkov HESS. L’école se placera aussi dans la perspective des instruments futurs, comme l’observatoire Cherenkov CTA ou le satellite SVOM pour l’observation des sursauts gamma.
On abordera les thèmes suivants
:

•    Moyens d’observation en rayons gamma
Les rayons gamma couvrent largement le spectre électromagnétique, allant d’une centaine de keV à 10 TeV ou au-delà. Les flux des sources en photons gamma s’étendent sur une large gamme (de ~10-3 photons/cm2/s aux plus basses énergies à 10-12 photons/cm2/s aux plus hautes énergies), nécessitant ainsi des télescopes ayant des surfaces adaptés à la gamme d’énergie explorée. De plus, le détecteur doit se trouver hors de l’atmosphère, celle-ci étant opaque aux photons gamma, dans l’espace ou en ballon stratosphérique, afin d’accéder aux mesures directes des photons. La mesure indirecte des gerbes atmosphériques, engendrées par les photons gamma incidents, peut être utilisée exclusivement à très haute énergie.
Nous passerons en revue les différents techniques de détection des photons gamma, au sol et dans l’espace. Une attention particulière sera portée sur les instruments en exploitation et sur les télescopes en développement.

•    Processus physiques des émissions à hautes énergies
Les émissions observées en astronomie gamma sont en général associées à l’existence de populations de particules non-thermiques, accélérées par des sources variées et selon des mécanismes différents. Nous aborderons plus particulièrement ces mécanismes d’accélération ainsi que le transport des particules dans le milieu interstellaire et intergalactique. Nous passerons aussi en revue des processus radiatifs et relativistes de haute énergie qui sont à l’origine des émissions observées.


•    Observations de rayons gamma : analyse de données Fermi
La mise à disposition de la totalité de la base de données du satellite Fermi, juste un an après l’entrée en fonction de l’instrument, a permis à la communauté scientifique de faire des progrès significatifs. Nous allons profiter de cette opportunité pour organiser des travaux pratiques autour de l’analyse des données. L’importance d’un tel apprentissage requiert un après-midi entier à cette activité, et avec la possibilité de la poursuivre en soirée. Le but affiché est de se familiariser avec les méthodes et les outils utilisés pour l’exploration du ciel aux hautes énergies. Ainsi, on pourra se confronter de manière explicite à la problématique de l’analyse de données, ce qui permettra aussi d’apprécier les incertitudes observationnelles.

•    Sources d’émissions aux hautes énergies
Aujourd’hui, l’astronomie gamma vit une période particulièrement faste, et ce grâce à l’exploitation des données du satellite Fermi lancé en 2008 (gamme d’énergie de 100 MeV à 100 GeV) et des détecteurs Cherenkov au sol de dernière génération (>100 GeV ; HESS, MAGIC, VERITAS), qui ont révolutionné ce domaine. C’est la première fois que le domaine électromagnétique est couvert au-delà de 100 MeV.
Les progrès dans l’instrumentation ont permis d’accroître de manière spectaculaire le nombre de sources (radio-galaxies et blazars, pulsars gamma, restes de supernova, nébuleuses à vent de pulsar…) afin d’en affiner leurs propriétés, et de découvrir de nombreuses sources de nature nouvelles (pulsars «milliseconde », binaires X, amas globulaires, lobes radio géant de radiogalaxies, galaxies à flambés d’étoiles, …). En plus des sources individuelles, on peut aussi étudier les régions d’accélération des particules et leur propagation à travers notre galaxie, l’interaction des rayons cosmiques avec le gaz interstellaire est en effet une source d’émission diffuse. Dans le domaine extragalactique, cette émission diffuse nous renseigne sur (la totalité de) la luminosité gamma qui est émise par des sources lors de l’histoire de l’Univers, ainsi que sur son évolution aux énergies les plus hautes. La qualité des données actuelles permet aussi une recherche de plus en plus poussée sur les composantes plus exotiques, résultantes de l’annihilation de candidats de matière noire.
Ces avancées observationnelles sollicitent un effort conséquent dans l’interprétation des données ainsi que pour mieux les caractériser dans d’autres bandes spectrales. En particulier, la surveillance  du ciel par Fermi (balayage en 3 heures) permet de détecter l’apparition ou le changement d’une activité des sources transitoires ou variables, incitant ainsi leur observation. La confrontation des données gamma au GeV et celles au TeV permet de mieux contraindre les processus d’émission qui sont à l’origine de ces rayonnements.
À plus basses énergies, la mission INTEGRAL a apporté des nouvelles contraintes sur les processus de nucléosynthèse galactiques, et en particulier, sur l’origine des positrons dans notre Galaxie. Bien que les positrons puissent être naturellement produit en abondance lors des explosions d’étoiles ou par les jets des objets compacts, une contribution de l’annihilation de la matière noire n’est toujours pas à exclure. Un effort de modélisation est nécessaire pour comprendre au mieux les observations afin de s’affranchir des questions de propagation et d’annihilation des positrons dans notre galaxie.
Toutes ces questions  sur les sources d’émissions gamma seront abordées autant sur des aspects observationnels que théoriques.


•    Rayons cosmiques
En astronomie gamma, l’étude des rayons cosmiques peut se faire par le biais de leurs interactions avec les composants du milieu interstellaire. Plus directement, le rayonnement cosmique est observable par les télescopes Fermi et HESS. Ils ont fourni une mesure inédite du spectre à haute énergie de la composante électronique des rayons cosmiques. Ces mesures sont complétées par des observations avec le satellite PAMELA, dédiées à l’étude des rayons cosmiques à basses charges et à des énergies au-delà de 50 MeV. Les données des trois instruments montrent des variations spectrales inattendues, ce qui a suscité leur interprétation, éventuellement liée à l’annihilation de la matière noire. Néanmoins, une origine purement astrophysique, comme l’accélération des leptons par des sources proches tel que les pulsars ou les restes de supernova, représente une alternative plus conventionnelle. Au cours de cette école, on abordera également les données obtenues par les vols ballons successifs de l’expérience CREAM et les avancées attendues avec AMS-02. Celles-ci apportent ou apporteront des contraintes sur le régime de propagation des rayons cosmiques ainsi que sur la composante d’anti-matière.
Aux plus hautes énergies, l’observatoire Pierre Auger a été conçu pour la détection et l'étude des rayons cosmiques dont les énergies sont autour et au-dessus de la coupure spectrale de GZK (cad, supérieures à 1019 eV) avec une précision sans précédent. Aujourd’hui, nous ne connaissons pas les mécanismes qui sont à l’origine de la production et l’accélération des particules à de telles énergies macroscopiques. Généralement peu déviés par les champs magnétiques galactiques et intergalactiques, la direction d’arrivée sur Terre des rayons cosmiques d’ultra-haute énergie (E > 5  1019 eV)  peut situer leurs sites d’accélération. Les premiers 27 événements avec des énergies supérieures à 5,7  1019 eV qui ont été enregistrés par l’observatoire Pierre Auger sont distinctement distribués d’une manière anisotrope sur le ciel. Cette anisotropie semble être corrélée avec la densité de la matière dans l’Univers proche, telle quelle est représentée par la distribution des noyaux actifs galactiques à une distance < 75 Mpc.
Nous allons aborder l’apport des observations directes des rayons cosmiques, et nous établis serons des liens entre ses mesures directes et les observations indirectes effectuées en astronomie gamma.


•    Ondes gravitationnelles
L’énorme potentiel scientifique lié à la détection des ondes gravitationnelles couvre plusieurs domaines, allant de la physique fondamentale à la cosmologie, en passant par l'astrophysique. Par exemple, la vitesse des ondes gravitationnelles pourrait être mesurée en comparant les temps d’arrivée à chaque détecteur à ceux de signaux électromagnétiques provenant de la même source (par exemple un sursaut gamma). D’autre part, la masse du graviton pourrait être contrainte en cherchant des distorsions dans la forme d’un « chirp » (gazouillis) gravitationnel, par rapport à celle prévue par la relativité générale. En astrophysique, la coalescence des objets compacts (étoiles à neutrons et trous noirs) est une source intense d’ondes gravitationnelles, ouvrant ainsi un vaste domaine d’investigations qui devrait permettre de mieux cerner la physique de ces objets extrêmes. Enfin la détection des ondes gravitationnelles primordiales donne la possibilité d’étudier la phase de l’inflation de l’univers.
Les dernières années ont été marquées par les premières mesures scientifiques des interféromètres kilométriques Virgo et LIGO, qui ont maintenant des sensibilités très proches des celles qui étaient prévues. Désormais il est possible de détecter une coalescence d’une binaire d'étoiles à neutrons de 1,4 masses solaires à 15 Mpc environ et celle d'une binaire de trous noirs de 20 masses solaires à environ 70 Mpc. Avec ces limites, les taux estimés d’événements sont encore trop faibles pour assurer une détection (environ 1 événement sur 200-300 ans). Toutefois, les détecteurs de deuxième génération, Advanced Virgo et Advanced LIGO apporteront une amélioration en sensibilité par un facteur 10, se traduisant par un taux de détection pour les coalescences d’étoiles binaires de quelques événements par an pour les modèles les plus pessimistes à une centaine d’événements par an pour les modèles les plus optimistes. Ainsi, la première détection d’ondes gravitationnelles est à notre portée de main.
Nous allons aborder les prospectives scientifiques liées à l’observation des ondes gravitationnelles, et nous présenterons l’état de l’art des techniques de détection. Le lien entre l’observation des ondes gravitationnelles et celle des sources compactes à haute énergie sera tout autant développé.

•    Neutrinos
La détection de neutrinos cosmiques est un enjeu important en astrophysique des hautes énergies, car elle permettra de trancher sur l’origine hadronique ou leptonique des particules accélérées dans les sources de rayons cosmiques. Interagissant faiblement avec la matière, leur détection requiert alors un volume cible gigantesque, ce qui attribue aux méthodes d’observation une spécificité de nature géologique. Dans cette perspective, les détecteurs de IceCube sont enfouis sous la glace antarctique et le télescope ANTARES est situé dans des profondeurs abyssales de la mer Méditerranée. La prochaine étape envisagée qui pourra apporter la possible première détection d’un neutrinos cosmique est le projet KM3NeT qui vise un volume instrumenté de plus d’un km3 pour un détecteur sous-marin en Méditerranée. Ce télescope devrait améliorer d’un facteur 50 la sensibilité actuellement accessible par ANTARES et présenter une résolution angulaire significativement meilleure que IceCube à haute énergie.
Nous discuterons le potentiel scientifique du domaine de l’astronomie des neutrinos et explorerons les liens avec les observations photoniques à haute énergie.


•    Perspectives
Le domaine de l’astroparticule se développe aujourd’hui au niveau européen, voir au niveau mondial, avec la conception et la réalisation des instruments de plus en plus performants et de plus en plus complexes. Pour coordonner les efforts des pays européens, des structures de coordination se sont mis en place, telle que ASPERA pour l’astroparticule ou ASTRONET pour l’astrophysique. Nous terminerons cette école avec une revue sur les feuilles de routes établies par ces structures de coordination.


Objectifs de formation
Les objectifs de cette école sont à la fois la formation des chercheurs dans cette thématique, l'éventuel accompagnement de leur reconversion, et une mise à niveau extrêmement pointue au moyen de cours et de séminaires traitant de développements théoriques/expérimentaux les plus récents. En particulier, les orateurs contribueront au titre d' «intervenants-participants», caractérisant ainsi l'esprit original de cette formation. Le but in fine est de répondre non seulement à l'exigence d'une approche pluridisciplinaire, en sollicitant des spécialistes et avec un constant souci de pédagogie, mais aussi à celle d'une formation permettant d'être en prise directe et efficace avec les techniques les plus récentes associées à cette discipline. Le choix d'un hébergement sur site contribuera davantage au rapprochement des communautés impliquées.

Public concerné
Cette école s'adresse prioritairement aux chercheurs CNRS et universitaires, post-doctorants et doctorants, dans les domaines des astroparticules, l'astronomie, la physique théorique et la physique des particules élémentaires, avec un objectif d’acquisition de compétences complémentaires et/ou de reconversion. Les chercheurs appartenant à d'autres communautés pourront aussi se sentir concernés, et ce en fonction des thèmes traités.

Pré-requis
Il est requis un niveau doctoral indifféremment en Astronomie, Astrophysique, Physique Théorique et Physique des particules. Bien qu'une mise à niveau préliminaire ne soit pas exigée, elle est souhaitée car non intégrée à l'école.

Les grands axes du programme

Astronomie Gamma (sol, espace) - Processus et sources d’émission à haute énergie
Rayons cosmiques - Neutrino - Matière noire - Ondes gravitationnelles

Comité Scientifique

Michel Boer, Observatoire de Haute Provence
Josè Busto
, Centre de Physique des Particules
de Marseille
Paschal Coyle, Centre de Physique des Particules de Marseille
Bernard Degrange
, Laboratoire Leprince-Ringuet
Guillaume Dubus,
Institut de Planétologie et Astrophysique de Grenoble
Yves Gallant, Laboratoire de Physique Théorique et Astroparticules
Berrie Giebels,
Laboratoire Leprince-Ringuet
Stavros Katsanevas, Astroparticule et Cosmologie
Jürgen Knödlseder
, Institut de Recherche en Astrophysique et Planétologie
Julien Lavalle
, Département de Physique Théorique, Université de Turin
Benoit Lott
, Centre d'Etudes Nucléaires de Bordeaux Gradignan
Alexandre Marcowith, Laboratoire Univers et Particules de Montpellier
Jean Orloff, Laboratoire de Physique Corpusculaire, Clermont-Ferrand

Etienne Parizot, Astroparticule et Cosmologie
Guy Pelletier
,
Institut de Planétologie et Astrophysique de Grenoble
Pierre Salati, Laboratoire d'Annecy le Vieux de Physique des Particules
Roland Triay
, Centre de Physique Théorique

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