3.6 Groupe des automorphismes. Groupe de jauge

3.6.1 Remarque terminologique

Nous utiliserons souvent l’expression “repère en x” —sans mettre les guillemets !— pour parler d’un point z de P = P(M,G) se projetant au point x, même si le fibré considéré n’est pas un sous-fibré de l’espace des repères mais un fibré principal quelconque au dessus de M, avec groupe de structure G. Le contexte devrait suffire à préciser s’il s’agit d’un repère de l’“espace interne” —comme disent les physiciens— c’est à dire un élément d’un fibré principal quelconque non relié au fibré FM des repères linéaires, ou, au contraire, d’un repère de l’“espace externe”, c’est à dire un élément de FM (ou de OFM, ou d’un autre sous-fibré de FM).

3.6.2 Automorphismes verticaux d’un espace fibré principal (définition)

3.6.3 Ecriture locale des transformations de jauge

Soit Φ une transformation de jauge, z un élément de P et σ une section locale au voisinage de x = π(z) M. Le repère Φ(σ(x)) étant dans la même fibre (au même point !) que le repère mobile σ(x), il doit être possible d’atteindre le premier à partir du second par l’action d’un élément approprié de G que nous noterons g(x), puisque G est transitif sur les fibres. Cet élément est donc défini par l’équation Φ(σ(x)) = σ(x)g(x) c’est à dire encore par

g(x) = σ (x )-1Φ(σ (x )),
en utilisant la notation introduite en fin de section 3.2.1. Notons que g(x) dépend non seulement de Φ mais aussi de la section σ choisie ; on pourrait utiliser la notation un peu lourde σg(x) pour désigner cet élément.

Lorsque P est trivial, on sait qu’il existe des sections globales. Soit σ une telle section, alors, l’équation précédente définit une application de M dans G ; réciproquement, la donnée d’une application g(x) de M dans G permet, lorsque le fibré principal est trivial, de définir, via le choix d’une section globale σ, une transformation de jauge Φ par la même équation. Lorsque P est trivial, on peut donc identifier le groupe de jauge 𝔊 avec le groupe Ω0(M,G) des applications différentiables de M dans G. La correspondance n’est cependant pas canonique puisqu’elle dépend du choix d’une section globale σ. Cette identification “explique” pourquoi les automorphismes verticaux sont désignés par les physiciens (des particules) sous le nom de “transformations de jauge locales”, le mot “local” se référant ici à la dépendance “en x” car la transformation g(.) elle-même est globalement définie lorsque P est trivial.

3.6.4 Deux autres définitions des transformations de jauge

3.6.5 Automorphismes quelconques d’un espace fibré principal

Soit P = P(M,G) un fibré principal et 𝔊 son groupe d’automorphismes verticaux (groupe de jauge). Nous allons à présent considérer des automorphismes plus généraux que ceux considérés dans les sous-sections précédentes. Jusqu’à présent, nos automorphismes étaient verticaux, en ce sens que l’image Φ(z) de z par Φ était dans la même fibre que z. Nous allons garder les conditions 1 et 3 données dans la définition du groupe de jauge (section 3.6.2) mais atténuer la deuxième condition ; les automorphismes devront préserver les fibres au sens suivant : l’image d’une fibre devra être une fibre, mais on n’imposera pas le fait qu’image et antécédent appartiennent à la même fibre ! En d’autres termes, si x désigne un point de M, l’ensemble Φ(π-1(x)), image de la fibre au dessus de x par Φ doit être une fibre de P. Cette fibre image se projette en un certain point y de M. L’action d’un tel automorphisme Φ définit donc également une application de M dans M x on associe le point y tel que y = π(Φ(π-1(x)))). Cette application est, par construction, un difféomorphisme. On obtient donc de cette façon une projection du groupe AutP des automorphismes de P (le groupe engendré par les automorphismes que nous venons de définir) sur le groupe DiffM des difféomorphismes de M. Deux automorphismes de P se projetant sur le même difféomorphisme de M diffèrent manifestement (au sens de la composition des morphismes) par un automorphisme ne changeant pas le point de base, c’est à dire par un automorphisme vertical. Localement, ces “symétries de jauge” (nom qu’on donne quelquefois aux éléments de AutP) sont donc codées à l’aide d’un difféomorphisme de M et d’une transformation de jauge. Plus précisément, on a la fibration principale 𝔊↦→AutP↦→DiffM (noter que 𝔊 est un groupe de dimension infinie) qu’on peut représenter par la figure 3.19



Figure 3.19: Automorphismes de fibrés principaux


3.6.6 Action des automorphismes sur les espaces fibrés associés

3.6.7 Le cas des espaces vectoriels (un cas trivial mais instructif !)

Un fibré vectoriel n’est autre, intuitivement, qu’une famille Ex d’espaces vectoriels de même dimension, “collés” ensemble, et paramétrisés par une variété (x M). Lorsque M se réduit à un seul point, on n’a qu’une seule fibre et donc un seul espace vectoriel. On peut donc considérer un espace vectoriel E comme un fibré vectoriel au dessus d’un point ! Ce fibré vectoriel particulièrement trivial est associé à un fibré principal également constitué d’une seule fibre, fibre qui n’est autre que l’ensemble P des bases de l’espace vectoriel E. Si on suppose que E est isomorphe à I Rn, on voit que cette fibre est difféomorphe au groupe GL(n, I R). Si on choisit une base σ = {σμ} de référence (une section !), on obtient une correspondance bi-univoque entre bases (éléments de P) et matrices inversibles (éléments du groupe GL(n, I R)). L’identification de P avec GL(n, I R) dépend de la base σ choisie. Le groupe matriciel GL(n, I R) agit sur P ; cette action ne dépend pas du choix de σ. En effet, si e = (eμ) P et Λ = (Λνμ) GL(n, I R), on obtient e= eΛ P via eν= eμΛνμ. Les vecteurs u de l’espace vectoriel E sont des classes d’équivalence u = eμ.uμ avec e = {e μ}∈ P et uμ I Rn, la relation d’équivalence identifiant eμ.uμ avec e νΛμν.-1) ρμuρ. Le groupe GL(n, I R) n’agit donc pas sur E (il n’agit que sur les composantes des vecteurs de E). Par contre, l’espace vectoriel E possède un groupe d’automorphismes AutE (les applications linéaires bijectives). Si u E et Φ AutE alors Φu E ; les automorphismes Φ agissent aussi sur les bases e = {eμ}, l’action en question résultant de l’action sur chacun des vecteurs de base. Il faut bien voir que les groupes AutE et GL(n, I R) sont différents ! Cependant, si on se choisit une base σ = σμ de référence, on peut, de façon élémentaire —voir cours de Terminale de nos lycées— associer, à tout élément Φ de AutE, une matrice Λ de GL(n, I R). Dans le cas d’un espace vectoriel, donc, le groupe structural et le groupe des automorphismes (qui, dans ce cas, sont nécessairement verticaux), bien que conceptuellement distincts, sont identifiables dès qu’on se choisit une base de référence (c’est à dire une section de ce fibré !). En particulier, lorsque E est de dimension finie, ces deux groupes sont de dimension finie. Dès qu’on passe au cas de fibrés vectoriels au dessus d’une variété M non réduite à un point, l’identification n’est plus possible : G = GL(n, I R) reste ce qu’il était mais 𝔊 = AutV P devient un groupe de dimension infinie qu’on peut se représenter intuitivement comme une famille de groupe d’automorphismes d’espaces vectoriels (les fibres de E) paramétrisés par les points de la base M.